Guide de visite des quais

Signalétique patrimoniale sur les quais de Libourne entre le pont de pierre et l’impasse de Pamperdut

Le pont de Pierre

Jusqu’au début du XIXe siècle, on ne pouvait franchir les cours d’eau à Libourne, comme à Bordeaux, que grâce à des bacs. Les progrès techniques permirent alors la réalisation de ponts en pierre dotés de fondations adaptées au sol vaseux, et assez solides pour résister à la force des courants. Le pont de Libourne est l’œuvre des architectes Jean-Baptiste Billaudel et Claude Deschamps qui ont également construit le Pont de Pierre à Bordeaux. Édifié entre 1820 et 1824, ce pont permit à Libourne de maintenir sa place économique sur les grandes routes commerciales qui se développèrent alors aux dépens du trafic fluvial. Le 28 août 1944, avant d’évacuer Libourne, les troupes allemandes firent sauter 3 des 9 arches. Elles furent reconstruites à l’identique. Le pont fut remis en services dès le mois de janvier 1945.

Construit en pierre et brique, le pont de Libourne était regardé lors de sa construction comme une véritable prouesse technique à l’instar du pont de pierre de Bordeaux. Cet ouvrage d’art manqua d’être détruit par les allemands à la fin de l’occupation. Les arches détruites à l’explosif et reconstruites à la Libération sont encore reconnaissables à leur couleur plus vive de leurs briques neuves.

L’embouchure du Lour

Le Lour, le ruisseau du loup, se jette dans la Dordogne non sans avoir préalablement traversé les vignes et les faubourgs de Libourne puis circulé sous le cours des Girondins. Il est aujourd’hui entièrement canalisé. Selon certaines théories, son embouchure aurait été utilisée par les Romains pour créer un port. Le Lour circulait au Moyen-Âge au pied des fortifications. Entre les 16e et 17e siècles un moulin utilisant les courants des marées était aménagé à son embouchure, non loin du pont de pierre. Ces vestiges disparurent à la construction du pont.

Ce plan de Libourne à la période qui précède la création de la bastide fait apparaitre le cours du Lour. En 1270, il fut naturellement choisi comme l’une des limites de la nouvelle agglomération, bientôt bordée d’un mur de défense.

Le quartier du Priourat

Entre le quai du Priourat et la rue des Quatre Frères Robert s’étend le quartier du Priourat. Situé hors les murs de la bastide, sur des terrains inondables, ce site doit son nom à un prieuré, c’est-à-dire une exploitation agricole propriété du clergé au moyen-âge. Initialement modeste faubourg, ce quartier est urbanisé au 19e siècle avec la construction du pont et l’implantation des chais de négociants qui drainaient une importante population ouvrière.

Cette vue aérienne du quartier du Priourat prise au début du siècle dernier matérialise sa structuration urbaine. Les chais reconnaissables à leurs toitures longues et larges sont implantés au plus près de la rivière et du quai qui offrent les facilités de circulation nécessaires. À l’arrière, des bâtiments d’habitation où se mêlent de belles maisons bourgeoises et des échoppes plus modestes.

Les chais des négociants

Apparue au milieu du 18e siècle, la profession de négociant en vins se développe au siècle suivant. Son exercice nécessite de vastes locaux de stockage et d’expédition. Les quais de la Dordogne, le long du Priourat, présentent pour ce commerce des terrains disponibles et une desserte tant fluviale que routière. Les chais sont alors construits en retrait des voiries pour la manutention des barriques. Les quais comportent des cales pour le chargement des gabarres. Les façades richement sculptées de certains chais témoignent de l’opulence de leur propriétaire.

L’épave de la « Marie Salope »

Parmi les avantages offerts par ses rivières à Libourne, il faut compter l’exploitation du sable de rivière, matériau très utile pour la construction des maçonneries. Cette exploitation se développe à partir des années 1820 avec la construction des ponts. Elle donne lieu à la création d’une usine, « la sablière » qui subsistera sur le quai du Priourat jusqu’aux années 1980. Elle nécessite la mise en œuvre d’une drague qui retire le sable du fond de la Dordogne.

En langage girondin ce type d’embarcation est appelé « Marie Salope ». A Libourne, le naufrage de cette drague signa la fin de l’exploitation du sable de rivière. Ses restes échoués sur la berge ne sont visibles qu’à marée basse. La rue de La Sablière conserve le souvenir de cette activité disparue.

Partie avant d’une embarcation dont la taille avoisinait celle d’une péniche parisienne, cette épave fantomatique abandonnée aux vases de la berge nous conserve le souvenir d’une activité fluviale qui fait désormais partie du passé.

Le pont des chemins de fer

Libourne est située sur la ligne de chemin de fer Paris-Bordeaux dont la construction fut décidée en 1844. Sa réalisation a notamment impliqué la construction d’un pont sur la Dordogne et d’un viaduc sur les marais de la palus d’Arveyres. Édifié entre 1846 et 1850 sur le modèle du pont de pierre, ce pont de 9 arches, long de 220 mètres, constitue pour l’époque une réalisation technique remarquable puisque ses fondations traversent un sol vaseux, parfois épais de 19 mètres. Détruit par les Allemands le 28 août 1944, il a été reconstruit à l’identique et demeure un point de passage important pour le trafic ferroviaire.

Le passage à Libourne de la ligne de chemin de fer Paris Bordeaux, puis le développement des réseaux secondaires, permit à Libourne de maintenir son rang de nœud routier et commercial. Les chemins de fer prennent ainsi le relai du trafic fluvial multiséculairepuis du trafic routier développé depuis le milieu du 18e siècle.

Le poste de garde de l’armée allemande

Entre les mois de juin 1940 et août 1944, la ville de Libourne est occupée par l’armée allemande ; la gare et les ponts franchissant l’Isle et la Dordogne deviennent des points stratégiques qui sont étroitement surveillés. Un poste de garde est alors établi dans l’un des bâtiments proches du pont ferroviaire. Dans les derniers mois de l’occupation, les Allemands réquisitionnent des civils pour participer à cette surveillance. Ces longues journées d’attente donnent aux soldats de garde l’occasion de graver leurs initiales sur les murs de leur casernement. C’est aujourd’hui le seul vestige visible de ces événements.

Passé le pont des chemins de fer en suivant la rive de la Dordogne, le chemin prend un caractère nettement campagnard. Discrets, régulièrement cachés sous le lierre qui couvre les murs, les graffitis laissés par les gardes allemands sont les seuls témoins qui rappellent aux promeneurs l’importance stratégique de ce site durant l’occupation.

La Font Moreau

Il s’agit ici d’un petit ruisseau dont la source est toute proche. La Font Moreau, ou fontaine Moreau, à l’instar du ruisseau de la Fonneuve au cœur de la bastide ou du Lour, fait partie des nombreuses sources et ruisseaux qui percent en bordure de la Dordogne. Elles sont alimentées par les eaux pluviales tombées sur les plateaux calcaires du saint-émilionnais. Comme la Fontaine Roudeyre et quelques autres sources, la Font Moreau alimentait un lavoir au 19ème siècle.

Aujourd’hui, le lavoir de la Font Moreau a disparu. Les machines à laver modernes ont fait oublier que laver son linge au lavoir était une tache éprouvante malgré les services  déjà importants que rendaient aux ménagères ces équipements publics ou privés. Ils étaient nombreux à Libourne et exploitaient tous les sources et les ruisseaux qui coulaient près des rivières.

Le carrelet

La pêche au carrelet consiste à plonger un filet tendu sur un cadre, puis à le retirer vivement des eaux de façon à piéger les poissons qui se trouvent à sa surface. Les carrelets sont à cet effet montés sur un mat pivotant et munis d’un treuil. Ils permettent ainsi de nombreuses prises depuis la berge. Avant son interdiction, la pêche à la piballe, l’alevin d’anguille, faisait partie des pêches saisonnières couramment pratiquées au carrelet. Parfois dotés de cabanes et d’équipements perfectionnés, les carrelets font partie intégrante du paysage des berges et de l’art de vivre girondin sur les bords de la Dordogne et de la Garonne.

Implanté sur les berges des rivières, sur un ponton, le carrelet nécessite une infrastructure importante. Malgré cela, il reste encore un mode de pêche couramment pratiqué sur les cours de la Garonne, de la Dordogne, et de l’estuaire de la Gironde.

Du pont de pierre à la fontaine Roudeyre

Le quai Souchet

Implanté au confluent de l’Isle et de la Dordogne, le quai Souchet occupe une position essentielle dans l’histoire de Libourne. La rencontre des courants des rivières et le phénomène des marées  ont en effet creusé dans le lit du fleuve une fosse permettant aux navires de haute mer d’accéder au port de Libourne et d’y séjourner sans s’échouer, même à marée basse, malgré leur fort tirant d’eau. Ces navires venus des mers d’Europe ont ainsi pu rencontrer à Libourne le monde des fleuves aquitains pendant des siècles. Une importante flottille et de nombreux dockers se chargeaient alors des opérations de chargement et de déchargement des marchandises, essentiellement dirigées vers les quais de l’Isle.

Au moyen-âge, les jurats étaient chargés de la police et de l’administrations du port de Libourne. Ils furent progressivement déchargés de cette mission au profit des fonctionnaires royaux de l’Amirauté, à qui Louis XIV avait donné mission d’administrer les ports de son royaume et leur flotte. L’un de ces fonctionnaires fut Léonard Souchet qui à la fin du 18e siècle fit planter des arbres sur les terrains de la confluence et permit de transformer ce lieu d’activité portuaire en un lieu de promenade ombragée.

La Tour du Grand Port

La Tour du Grand Port est le vestige le plus important et le mieux conservé des fortifications qui entourent la bastide Libourne dans la première moitié du 14e siècle. Parmi les neuf portes que compte cette enceinte, elle est avec la porte de Saint-Emilion l’un des accès les plus importants de la ville, car elle communique directement avec le port dans sa partie la plus active.

Ensemble fortifié avec soin, la Tour du Grand Port est en fait une porte de ville entourée de deux tours rondes, très élevées, munies de mâchicoulis et d’archères qui constituent un véritable bastion à l’entrée du cours de l’Isle. Il contribuera pleinement à la défense de la ville entre la guerre de cent ans et les conflits de la Fronde dans les années 1650. A partir de la fin du 17e siècle, la construction de plusieurs bâtiments civils en appui sur ses murs lui évitera la démolition lors de la Révolution.

La Tour du Grand Port a pu retrouver son apparence médiévale après plusieurs campagnes de restauration entre 1930 et 1980.

Le Pont de Fronsac

Alors que depuis 1824 la construction du pont de pierre avait écarté toute difficulté pour le franchissement de la Dordogne à Libourne, il faut encore attendre 1831 pour qu’un pont soit établi sur l’Isle en remplacement des bacs qui depuis des siècles traversaient cette rivière au droit de la tour du Grand Port. C’est une technologie nouvelle qui va être employée pour contournées les difficultés que représentent les vases, les courants et l’alternance des marées. Celle des ponts suspendus et de l’emploi des câbles et des tabliers métalliques. Construit en moins d’un an, ce pont ouvre pour Libourne les voies terrestres vers Saint André de Cubzac Blaye et l’estuaire de la Gironde. Ce faisant, il contribuera aussi à l’agonie du monde du transport fluvial et des gabarres. 

A la veille de la Guerre de 1914, la création d’une ligne de tramways reliant Libourne et Saint André de Cubzac nécessite la construction d’une passerelle spéciale qui double le pont suspendu. Il s’agira d’une structure de type Eiffel reliant les deux rives d’une seule portée.

Ces deux ouvrages d’art seront mis à mal par les allemands à leur départ de Libourne en 1944.

La fermeture définitive de la ligne de Tramways en 1954 entrainera la suppression de la passerelle tandis que le pont suspendu est remplacé par le pont actuel, construit en béton précontraint. 

Le pont de Fronsac et sa passerelle furent d’abord édifiés grâce à la métallurgie et aux progrès industriels emblématiques du 19e siècle ,avant d’être remplacés par un pont en béton précontraint, invention technique du 20e siècle.

La fontaine Roudeyre

La fontaine Roudeyre est l’une des multiples sources qui bordait jadis les rives de l’isle et qui sontà l’origine du nom donné au faubourgs qui s’y est développé, hors des murs de la bastide, à partir du 18e siècle, le faubourg des Fontaines. La fontaine Roudeyre présente la particularité d’être la seule de ces sources qui soit encore visible et de donner une eau reconnue potable jusqu’au début des années 1950. D’un débit permanent cette source procurait aux riverains une alimentation appréciable en eau pour les besoins de toute sorte, consommation alimentaire, eaux ménagères ou agricoles, y compris le ravitaillement des gabarres qui remontaient l’Isle.

L’aménagement connu le plus ancien du lavoir remonte à 1683. Les constructions actuelles ont été édifiées en 1832. Le lavoir était alors entouré de parois de bois et entièrement couvert d’un toit de tuile. Au début des années 1960 le lavoir échappe de peu à la démolition. Les travaux de restauration qui sont alors décidé ne laissent subsister que les éléments de pierre qui soutenaient à l’origine les charpentes, et donnent au bassin son profil de péristyle gréco-romain.

Quoiqu’éloignée de son utilisation et de son apparence d’origine, la fontaine Roudeyre est aujourd’hui l’une des étapes majeures des promenades libournaises sur les bords de rivières.